Je vous propose une analyse zététique de la pratique de l’art-thérapie en France.
J’ai plagié volontairement le titre du documentaire « La sociologie est un sport de combat » réalisé par Pierre Carles pour vulgariser les travaux de Pierre Bourdieu.
Chapitre 1 : mon combat
L’art-thérapie est un sport de combat résume assez bien mon action pendant 30 ans comme art-thérapeute à l’Hôpital de Béziers en service de psychiatrie.
Puis mon travail d’enseignant-vacataire auprès des universités de Toulouse et de Barcelone dans divers Diplômes et Masters universitaires d’Art-thérapie.
Mon action et mon engagement pour donner des lettres de noblesse à cette pratique de l’art-thérapie. Un métier toujours en devenir et pour cause ce n’en n’est pas un mais seulement une pratique.
Avec mon Association de Recherche en Art et Thérapie (ARAT), j’ai essayé d’expliquer que l’art-thérapie a été conçue comme une pratique destinée aux professionnels de santé. C’est-à-dire une pratique destinée à des personnes ayant une spécialisation et qui de ce fait deviennent sur- spécialisées comme psychiatre et art-thérapeute, psychologue et art-thérapeute, infirmier et art-thérapeute, éducateur et art-thérapeute, etc...
Mais l’art-thérapie n’en devient pas pour autant un métier, elle reste seulement une pratique pour des professionnels.
Chapitre 2 : l’illusion
On a fait croire que l’art-thérapie, c’est un métier. Se sont engouffrés dans cette brèche les responsables des diplômes universitaires et les directeurs des formations privées en art-thérapies.
Et bien évidemment, se sont engouffrées dans cette brèche des centaines de personnes cherchant une situation professionnelle ou une reconversion.
On leur a fait croire que le certificat d’art-thérapeute était validé et reconnu par l’Etat. On a même poussé jusqu’à leur dire que c’est un Diplôme d’Etat.
Et ils l’ont cru ! Les gens se bousculent au portillon, tous veulent être art-thérapeute, tous veulent soigner comme appelés par le messie !
Chapitre 3 : La Business-school of art-therapy
Des écoles d’art-thérapie ont poussé comme des champignons en nous faisant oublier que ce n’étaient que des organismes de formation privés à but lucratif.
Nous sommes passés progressivement d’une terminologie médicale et soignante à une terminologie commerciale en parlant du malade et du patient et pour finir du client.
De la relation transférentielle qui met en jeu le soin psychique nous sommes passés à une relation commerciale avec un management d’entreprise.
Dans les formations d’art-thérapie on vous apprend à monter votre auto-entreprise d’art-thérapie et à gérer votre clientèle.
Nous sommes dans la posture du business-art-thérapeute.
Chapitre 4 : changement de paradigme
Cette pratique de l’art-thérapie nécessite une connaissance approfondie des sciences humaines et surtout de la psychopathologie clinique, ainsi qu’une pratique artistique.
Elle trouve son plein emploi dans l’institution hospitalière qui fournit un terrain d’expérimentation et d’apprentissage de la clinique.
Nous constatons qu’à partir des années 2000, cela fait à peine une vingtaine d’années, un changement de paradigme et un glissement vers des pratiques non-scientifiques, hors des sciences humaines, hors de la psychologie et de la psychiatrie, ont eu lieu.
Ce sont développés des ersatz d’art-thérapies uniquement basés sur des pratiques artistiques, des recettes pratico-pratiques appelées processus de création, alors qu’il faut entendre la création comme une médiation dans un processus thérapeutique.
L’évacuation des sciences humaines a permis la mise en place du développement personnel, du coaching comportemental, du bien-être, de la spiritualité, du chamanisme, des thérapies non-médicamenteuses et des « médecines » parallèles…
Effectivement, en s’appuyant uniquement sur le processus de création artistique, nous avons évacué la clinique et les fondations apportées par les sciences humaines.
Dès lors, il suffit de proposer au patient une mise en contact avec l’art pour que le processus de création artistique fasse le reste.
Dans ce contexte, l’art devient guérisseur et chamanique !
Ces confusions sont évidemment dommageables pour une reconnaissance du métier d’art-thérapeute en France.
Chapitre 5 : la dévaluation
La prolifération des certificats en art-thérapie que ce soit en présentiel ou en distanciel a entrainé une surenchère inflationniste qui dévalue la valeur de ces diplômes.
Plus il y a de diplômes et moins ils sont pris au sérieux entrainant une dévaluation de la pratique de l’art-thérapie.
Le résultat final étant une paupérisation de l’activité d’art-thérapeute.
Pour faire un parallèle entre l’économie et l’art-thérapie française ; nous trouvons une inflation de diplômes, une dévaluation et un abaissement du niveau de compétences aboutissant à une dette des savoirs. Avec une impossibilité de construire un vrai métier et de fédérer la profession d’art-thérapeute.
Chapitre 6 : la réévaluation / désinflation
Les colloques, conférences, séminaires sur la profession d’art-thérapeute se sont multipliés dans l’hexagone rendant possible comme dans un mirage cette illusion d’un métier fantasmé.
Les autorités doivent réguler cette pratique de l’art-thérapie.
La réévaluation consistera à construire un Diplôme d’Etat d’Art-Thérapeute si toutefois nous tombons un jour d’accord sur l’ingénierie de ce métier. Diplôme enregistré auprès du Ministère de la Santé et obtention d’un Numéro ADELI par l’ARS.
La mise en place d’un DEA-T permet d’avoir un diplôme unique reconnu par tous. C’est aussi la fin de tous les charlatanismes concernant l’art-thérapie.
Chapitre 7 : art-thérapie et syndicat
J’observe depuis plus de 30 ans le microcosme de l’art-thérapie française, de nombreuses tentatives ont eu lieu pour fédérer les art-thérapeutes.
Création de coordinations et de syndicats qui n’avaient pas de véritables militants pour faire aboutir les revendications des art-thérapeutes, qui n’avaient pas de réels projets pour amalgamer du collectif parmi les individualités des art-thérapeutes.
Jusqu’à ce jour il n’y a pas d’interface entre les art-thérapeutes et le Ministère de la Santé.
Chapitre 8 : faire un choix
Reste la question que personne se garde bien de trancher à savoir l’art-thérapeute est-il un soignant ou un artiste ?
Aujourd’hui l’art-thérapeute demeure cantonné dans les professions libérales non réglementées comme le guérisseur, le magnétiseur, la cartomancienne, la voyante, l’énergéticien, etc…
Conclusion :
Après avoir passé l’art-thérapie française au crible de l’esprit critique, je ne pense pas recueillir la bienveillance confraternelle et corporatiste des art-thérapeutes et des organismes de formation qui surfent sur la vague de l’art-thérapie.
C’est pour cela que l’art-thérapie est un sport de combat.
Vous pouvez retrouver la vidéo sur YouTube : l’art-thérapie est un sport de combat sur La chaîne de l'art-thérapie thérapeutique.
JEAN-LOUIS
AGUILAR / Art-thérapeute
IIDE des
Hôpitaux
DU de
« Psychiatrie, psychothérapies médiatisées et Créativité »
Praticien
en Art-thérapie
Praticien
en psychosomatique et relaxation
DU de
« Médecine, Méditation et Neurosciences »
Président de l’ARAT (Association de Recherche en Art et Thérapie)
Essayiste sur blogarat et blogart'blogueur
YouTubeur sur JLAA / TV et La chaîne de l'art-thérapie thérapeutique
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