lundi 28 septembre 2015

Un nouvel élan de Psy Cause France : réunion du 12 septembre 2015 avec l'association ARAT


Une nouvelle fois Psy Cause se réunit au Château des Fines Roches à Châteauneuf du Pape. Cette fois ci, les travaux sont centrés sur la nécessaire relance de la section française de Psy Cause International. Cette priorisation de l’ordre du jour a été suggérée par le Dr Jean Louis Griguer, psychiatre chef de pôle à Valence, membre de Psy Cause International et de la revue Psy Cause, organisateur des colloques à Rochegude, et par Mr Jean Louis Aguilar, art-thérapeute au Centre Hospitalier de Béziers, membre de Psy Cause International et de la revue Psy Cause, accompagné de trois cadres de l’ARAT (Association de Recherche en Art et Thérapie) dont il est le président.

 Cette réunion est introduite par un rapide tour d’horizon des activités internationales.


 Le N°1 d’Humanis Causa, le magazine grand public de Psy Cause Cameroun, est sur la table. Le premier colloque en santé mentale à Lomé (Togo) co-organisé par Psy Cause Togo, est évoqué. De même que le courriel du Pr Tabo nous annonçant la création imminente à Bangui de Psy Cause Centrafrique. Le N°69 sera consacré à la psychiatrie sénégalaise avec l’aide d’une subvention qui nous a été adressée par le Pr Thiam. Nous avons publié sur le site un résumé d’article sur un atelier d’art thérapie à Cotonou (Bénin). Une délégation de Psy Cause est attendue à Kinshasa. Une délégation venue de France sera à l’Institut Universitaire en Santé Mentale de Montréal les 18 et 19 septembre prochains. Plusieurs participants à la réunion ont exprimé le souhait que la Louisiane soit également concernée par notre démarche en Amérique du Nord. Le Dr Thierry Lavergne est excusé pour son absence à la réunion puisqu’il est parti en avant garde depuis deux jours à Montréal. Nous évoquons le travail de la cellule d’appui (les Drs Patricia Princet et Catherine Lesourd) qui poursuit sa mission à Madagascar et qui envisage d’organiser un voyage d’étude en Argentine où la clinique française a une place importante. Nos interlocuteurs japonais, les Drs Shigeyoshi Okamoto (co-président du congrès de Kyoto) et Kiyoshi Shiraishi, travaillent à la construction du numéro spécial Japon, à la conception duquel est associée notre chargée de mission pour l’extrême Orient, Mme Nyl Erb. Le Dr Shigeyoshi Okamoto compte nous faire parvenir un article, sur l’animisme, du Pr Kasushige Shingu, psychiatre lacanien et professeur d’anthropologie à Kyoto. Le Pr Ka Sunbaunat (président de notre congrès de Siem Reap au Cambodge) va nous envoyer un article sur « psychologie et psychanalyse dans le bouddhisme ». Le président, enfin, revient d’un repérage réalisé accompagné de sa femme en Tunisie en vue d’un congrès dans le sud tunisien en octobre 2016. Les participants à la réunion sont conscients de l’importance pour les professionnels tunisiens, dans le contexte actuel de leur pays, de réaliser ce projet, et expriment leur solidarité. Nous avons besoin de l’engagement des associations tunisiennes et nous adapterons le format au contexte de l’automne 2016.

Ce que l’on peut dire, c’est que Psy Cause est très dynamique en international, avec un réseau en pleine croissance, actif et motivé. Par contre, il y a aujourd’hui à faire pour relancer Psy Cause en France. Ce dont est conscient Mr Yves Chmielewski, référent de Psy Cause France, présent à la réunion.

 Accueil de la délégation de l’ARAT



Mr Jean Louis Aguilar rappelle que l’ARAT a été créée en juin 2010, juste avant l’accueil à Béziers du congrès annuel national de Psy Cause en France, qui avait pour thème « L’art dans le soin ». L’association regroupe « des artistes et beaucoup d’art-thérapeutes ». Elle alterne une année l’organisation d’un colloque, et l’autre année la conférence art et folie. Mr Jean Louis Aguilar présente ensuite les membres de la délégation qui l’ont accompagné. Mme Bénédicte Carrière est art-thérapeute libérale à Montpellier, Mme Guénaelle Reynes est éducatrice spécialisée dans un IME près de Montpellier, Mme Virginie Mazière est psychanalyste et art-thérapeute dans un EHPAD (Etablissement d’Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes) à côté de Béziers. Jean Louis Aguilar précise que lui même et la délégation de l’ARAT sont venus à la réunion pour apporter dans Psy Cause France des concepts et une vision du soin qui les mobilisent dans l’ARAT. L’association conduit sa réflexion autour de trois axes. Le premier axe est l’art à comprendre sous l’angle de la psychopathologie de l’expression, avec deux concepts complémentaires : l’art et la création. Le second axe est la psychanalyse qui est l’outil principal pour travailler avec la psychopathologie du patient dans la pratique de l’art-thérapie, bien que d’autres « tendances » coexistent dans l’ARAT (TCC, Jung, méditation, etc…). Le troisième axe est la psychothérapie institutionnelle, en particulier parce qu’elle est une référence dans les établissements médicosociaux de plus en plus confrontés à la présence de malades qui devraient relever de structures psychiatriques. Mme Guénaelle Reynes le constate au niveau de son travail en IME où elle est confrontée au fait que « la pédopsychiatrie ne fait plus son travail ». La logique comptable, dit-elle, fait que les malades mentaux ne sont plus sur les lieux de soins. C’est depuis environ cinq années que le changement est très ressenti. Il n’y a plus de points de rencontre au ministère et à l’ARS comme il y en avait autrefois, tellement le discours est à présent formaté. Mr Jean Louis Aguilar observe que cette situation a relancé les mouvements citoyens et le recours à l’empowerment, c’est à dire à des pressions associatives sur le pouvoir. En conclusion, la délégation de l’ARAT pense qu’il est intéressant de relancer Psy Cause France pour redonner la parole à toutes les professions de la psy.

 Rochegude III : « Les processus de création »



Le Dr Jean Louis Griguer prend la parole pour présenter son action au niveau des colloques de Rochegude. Il nous rappelle la première Journée en mars 2014 sur les états limites et la seconde Journée en avril 2015 sur les troubles bipolaires. Ces colloques sont importants car dans le fonctionnement international de Psy Cause, la section française doit s’assurer un ancrage dans un lieu où l’on puisse se rencontrer et se connaître dans le cadre d’un rassemblement à taille humaine. La limite de 60 participants et l’organisation des espaces conviviaux dans le château de Rochegude (situé à 15 km au nord d’Orange) le permettent. Il nous rappelle également que Rochegude I en 2014 et Rochegude II en 2015, ont permis « des communications de bonne qualité et des échanges avec des participants intéressés ».

Le Dr Jean Louis Griguer considère donc que nous devons poursuivre cette expérience avec un Rochegude III en avril 2016. Il a pensé à la problématique de l’art qui serait une opportunité de mettre sur le métier le partenariat qui s’annonce et est un sujet actuel et mobilisateur : « il y a matière mais il faut un angle différent de ce qui a été élaboré jusqu’à présent. » Il propose de ne pas utiliser le mot « art-thérapie » dans le thème du colloque. Un consensus avec la délégation de l’ARAT s’établit sur « Les processus de création ». Le Dr Jean Louis Griguer trouve ce titre très ouvert. Il permet de parler de la création de l’artiste, du soin et même du délire comme création. On envisage 6 à 7 intervenants. Diverses propositions sont émises et un programme va être établi par le Dr Jean Louis Griguer et Mr Jean Louis Aguilar qui collaboreront dans l’organisation de Rochegude III. Les discussions sur le contenu de cette Journée en 2016 font apparaître les différences quant au travail de l’art-thérapeute. Ainsi des tenants de la psychothérapie institutionnelle, à Saint Alban par exemple, considèrent plutôt la dimension lien social de la création artistique des malades mentaux. C’est le cas également du Dr René Pandelon qui vient de prendre sa retraite après avoir longtemps dirigé les ateliers de création artistique du Centre Hospitalier de Montfavet et qui ne veut pas d’art-thérapeute dans son association. À Saint Alban, on observe une réserve identique à l’égard de la présence des art-thérapeutes. La perception de l’œuvre du patient y est de la considérer comme de l’art brut. Inventée par Dubuffet en 1945, l’appellation « art brut » désigne la création de marginaux « indemnes de toute culture ». Cette terra incognita, qui s’ignorait elle-même jusqu’à ce que le peintre français en définisse les contours, est d’abord née dans le creuset des asiles psychiatriques. (Lire l’article de Jean Louis Aguilar sur ce sujet dans le blog de JLAA : Blogart’blogueur). Cette démarche est à l’opposé du travail de Gisela Pankow qui considérait l’objet créé comme un médiateur thérapeutique entre le patient et le psychothérapeute. C’est toute la question du sujet et de l’objet dans le soin.

Parmi les suggestions de communications, notons celle de Mme Bénédicte Carrière sur le clown, elle même étant clown hospitalier. Il est suggéré une table ronde sur Rimbaud avec, entre autres, les deux auteurs biterrois de l’article sur ce poète qui est paru dans le N°68 de Psy Cause (Fatiha Djilali-Messaoud et Bernard Guiter). Nous pourrions également solliciter le Dr Moïse Bénadiba pour une communication sur la bible et le soin dans le cadre du concept de création. Une table sera installée pour présenter les livres écrits par des intervenants.

La matinée de travail s’achève par le choix de la date de Rochegude III : le samedi 9 avril 2016.


Les échanges se poursuivent lors du déjeuner. Nous levons notre verre aux 20 ans de la parution du N°1 de la revue Psy Cause (presque jour pour jour en septembre 1995).

 Relance du courant de la psychothérapie institutionnelle dans Psy Cause France



 Dans le cadres de nos discussions sur la relance de Psy Cause France, le constat a été fait que le courant de la psychothérapie institutionnelle qui était très présent dans une première période de l’histoire de notre association, s’est quasiment éteint, ce qui est regrettable. Si la psychothérapie institutionnelle qui, il faut le rappeler, à quelque moment que ce soit dans son histoire, a toujours été minoritaire dans le monde hospitalier français, a beaucoup reculé en psychiatrie, en particulier depuis les cinq dernières années, elle inspire aujourd’hui un grand nombre d’institutions médicosociales, comme le fait observer Mme Guénaelle Reynes : « lorsque la prise en charge est compliquée, il faut être plusieurs. Il est alors nécessaire de créer des espaces de rencontre. » Mme Guènaelle Reynes accepte la mission, au sein de Psy Cause France, d’être la coordonnatrice et la personne contact d’une relance du courant de la psychothérapie institutionnelle. Cette relance pouvant passer par la création d’un groupe de recherche et de discussion dans l’association.

Cette question du travail en équipe pluridisciplinaire pour mieux appréhender ce qui se joue avec le patient et la réponse la plus pertinente que chacun devra apporter, est un apport conceptuel de la psychothérapie institutionnelle qui est toujours actuel et qui intéresse entre autre, les professionnels canadiens au niveau de Psy Cause.

Articles d’actualité dans Psy Cause

Mr Jean Louis Aguilar est venu avec le N°50 de la revue Psy Cause (octobre/décembre 2007) qui présente dans sa rubrique « Actualité scientifique méditerranéenne et occitane » un reportage sur les vingt deuxièmes rencontres de Saint Alban. Il souhaite que cette rubrique fasse retour dans la revue. Le Dr Jean Paul Bossuat lui répond que le développement d’internet depuis cette époque amène désormais à publier les reportages sur notre site. Et bien entendu nous sommes preneurs de comptes rendus qui nous seraient adressés.

À la clôture de notre réunion de ce 12 septembre, Mr Jean Louis Aguilar donne son accord pour être référent de l’art-thérapie au sein de Psy Cause. Nous remercions l’ensemble de la délégation de sa venue depuis Béziers et Montpellier et de son engagement dans le développement des activités de Psy Cause France.

Jean Paul Bossuat

dimanche 27 septembre 2015

Vite,un nouveau regard sur les crises migratoires !!!

mardi 22 septembre 2015

La guerre d’Espagne sous tous ses angles.

mercredi 26 août 2015, par Serge Bonnery

 
« Les réfugiés espagnols arrivent en France... La foule des réfugiés au Perthus » : photographie d’Auguste Chauvin transmise au New York Times depuis Perpignan le 29 janvier 1939 (collection particulière).  

A la fin des années 30, le photographe perpignanais Auguste Chauvin avait installé son studio sur le boulevard Clémenceau. Et il était l’un des rares, dans la région, à posséder un appareil conçu par un ingénieur français, Edouard Belin, qui lui donna son nom. Le « bélinogramme » (ou « bélinographe ») permettait de transmettre les photographies à distance par voie téléphonique.

Cette révolution technologique s’avéra précieuse lorsque les quelque 135 journalistes massés à la frontière franco-espagnole pour « couvrir » l’exode des Républicains espagnols, durent, par tous les moyens, transmettre leurs images qu’attendaient les Unes des journaux de l’époque.

Chercheur, commissaire d’expositions, Eric Forcada n’a de cesse de scruter les documents qui témoignent de la Retirada. Lors d’une vente publique, il a pu acquérir un lot de 42 tirages de presse racontant les derniers mois de la guerre civile, entre la chute de Barcelone le 26 janvier 1939 et, au même moment, l’arrivée massive de réfugiés sur le sol français.


Toutes ces photos étaient destinées au Wide World Photo, l’agence américaine adossée au New York Times. Or ces images, pour traverser l’Atlantique, ont toutes transité par le studio d’Auguste Chauvin. Elles ont « roulé » sur son bélinogramme, accompagnées de leurs légendes qui permettent aujourd’hui de les situer sans trop de difficulté dans l’espace et le temps.

« C’est ainsi que nous savons que Robert Capa était à Perpignan le 31 janvier 1939, sain et sauf », se réjouit Eric Forcada. Pour preuve : le télégramme envoyé au directeur de la photographie du magazine Life depuis les bureaux parisiens de The March of Time. L’info venait de... Perpignan d’où le célèbre photoreporter avait pu « beliner » - transmettre - ses images.

« Est-ce que les territoires ont une vocation ? », se demande Eric Forcada. Qui sait ? Le fait est que cinquante ans avant la création de Visa pour l’Image, Perpignan fut, en 1939, un centre du monde pour le photojournalisme.

Mais Eric Forcada ne s’intéresse pas seulement à la photographie de reportage pendant la guerre d’Espagne. Il a aussi sorti de l’ombre la collection de dessins d’un jeune artiste barcelonais des années 30 : Josep Subirats [1].
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 Le camp du Barcarès - Aquarelle de Josep Subirats (collection musée d’histoire de la Catalogne) 
 
Issu des Beaux-Arts, Subirats avait un réel talent pour l’affiche de propagande qu’il mit au service de la République espagnole à l’époque où il était encore nécessaire de convaincre.
En février 1939, Josep Subirats se retrouve au camp du Barcarès avant d’être transféré à Argelès puis au Champ de Mars à Perpignan. Ses dessins constituent un précieux témoignage sur la vie dans les camps français.

Mais, prévient Eric Forcada, l’œuvre de Subirats revêt « une valeur documentaire plus rare encore », en ce qu’elle montre aussi « les vaincus de l’intérieur », ceux qui n’avaient pas passé la frontière et se sont retrouvés internés dans leur propre pays. « Nous avons avec Subirats un témoignage saisissant sur toutes les facettes de l’Espagne vaincue et soumise », souligne Eric Forcada.

En figeant la vie quotidienne des camps, les dessins de Josep Subirats participent, selon lui, d’un « réalisme salvateur ». Et pour cause : « Il avait besoin de cet ancrage dans le réel pour ne pas devenir fou... »

Du Barcarès à Mathausen

Chacun a en mémoire la photo de Robert Capa montrant une colonne de réfugiés encadrés de gendarmes sur la plage du Barcarès. Au premier plan de cette image, un homme a été identifié. Il porte un pied photographique sur l’épaule. Il s’appelle Francesc Boix. Il a alors 19 ans.

 Francesc Boix au camp de Mathaüsen 

 Déporté à Mathausen, il lui sera confié l’identification photographique des internés. Cette fonction lui a aussi permis de réaliser des reportages clandestins qui, précise Eric Forcada, « constitueront autant d’éléments à charge contre le régime nazi lors du procès de Nuremberg » où Francesc Boix a lui-même témoigné.

Le document photographique prend dès lors une nouvelle dimension. Il devient « une preuve par l’image de l’innommable », cette barbarie perpétrée par des hommes à l’encontre de leurs semblables. Aucune des images de Capa, Taro, Chim ou Centelles ne sont neutres. C’est dans ces années noires du XXe siècle, des plages du Roussillon aux camps nazis, siècle que « le photoreportage acquiert son statut de grand témoin » et que l’image devient « le prisme de la compréhension » de l’Histoire.


« Pour que ce passé ne s’oublie pas »

Un séminaire dont les actes sont publiés aujourd’hui, s’est penché sur les représentations des chemins d’exils. Michel Cadé, président de l’institut Jean Vigo de Perpignan, explique.

Les déplacements forcés de populations, de « ceux qui n’ont pas le choix », insiste l’historien perpignanais Michel Cadé, ceux que les guerres, la maladie, la faim, jettent sur les routes incertaines du monde, forment le long cortège funèbre de l’histoire du XXe siècle. C’est à la manière dont ces chemins vers l’exil ou les camps ont donné lieu à représentation que s’est intéressé le dernier de trois séminaires transfrontaliers organisé en 2012 à Perpignan sous l’égide de l’institut Jean Vigo.

Ainsi que l’écrit Michel Cadé dans l’introduction aux actes du colloque qui viennent de paraître, il convient de distinguer deux temps de la représentation. « Celui de l’événement et de sa traduction immédiate » et celui « des constructions a posteriori » qui constituent, en quelque sorte, une médiatisation « de seconde main ».

La traduction immédiate d’un événement tel que la Retirada s’effectue notamment à travers un nouveau mode de représentation en pleine expansion à cette époque : la photographie dite de témoignage. Mais qu’ils soient extérieurs au conflit - tels le reporter photographe Robert Capa - ou qu’ils le vivent de l’intérieur comme Agusti Centelles, tous ces témoins expriment, selon Michel Cadé, « la difficulté pour la photographie à rendre compte du sens même d’une migration ». Ce qui, explique l’universitaire, « conduit les médias à privilégier des figures individualisées prenant valeur d’icône ». Laquelle a pour fonction de « transcender le temps de l’événement ».

 C’est ainsi que ces images nous parlent encore aujourd’hui, de même qu’elles ont pu susciter l’émotion - c’était le but - chez ceux qui les découvraient dans les journaux de l’époque.

Le séminaire s’est aussi intéressé à un autre mode de représentation, a posteriori celui-là, et qui est pour l’essentiel le fait d’artistes contemporains. « Comment, résume Michel Cadé, des artistes parlent de ces événements du passé en résonance avec ce qui se déroule aujourd’hui sous nos yeux ».

Les exemples ne manquent pas depuis quelques décennies. « Cette résonance avec le présent est forte », estime le président de l’institut Jean Vigo. « Quand on utilise le passé comme inspiration, c’est pour parler du présent », pense-t-il. Si l’une des vertus de l’art est de « renouveler le regard », il permet aussi « d’établir une continuité entre hier et aujourd’hui », effacer, en quelque sorte, « la censure historique et la chronologie ». Et si les expériences évoquées dans les actes du séminaire disent toutes, à leur manière, que l’horreur n’est pas de l’ordre du représentable - et qu’il faut donc lui trouver des langages de substitution - elles ne constituent pas moins un moyen de lutte contre l’effacement. « Ces artistes œuvrent tous, est convaincu Michel Cadé, pour que ce passé ne s’oublie pas ».

 Le camp du Barcarès - Aquarelle de Josep Subirats (collection musée d’histoire de la Catalogne)  

Trois séminaires

La question des déplacements forcés et des exils au XXe siècle a donné lieu, entre 2010 et 2012, à trois séminaires transfrontaliers dont le dernier s’est déroulé à l’institut Jean Vigo de Perpignan et dont les actes sont publiés aujourd’hui. Michel Cadé, professeur émérite à l’université de Perpignan et président de l’institut Jean Vigo, rappelle : « Ces trois séminaires ont rassemblé le Musée mémorial de l’exil de La Jonquère, le Mémorial du camp de Rivesaltes, les universités de Perpignan et de Gérone et l’institut Jean Vigo qui ont souhaité faire ensemble le point sur leurs recherches propres et les mettre en commun ».

Le premier séminaire qui avait eu lieu à La Jonquère, portait sur les déplacements forcés dans l’histoire du XXe siècle, la réflexion ne se limitant pas au seul événement que fut la Retirada tant le XXe siècle a été fortement marqué par les migrations et exils de populations. Le deuxième séminaire, à Rivesaltes, s’était penché sur les conséquences de ces déplacements du point de vue psychosomatique. Enfin, le dernier s’est intéressé à la manière dont ces drames ont donné lieu à représentation, tant sur le plan journalistique et documentaire qu’artistique.

 Bibliographie

Chemins d’exils, chemins des camps, images et représentations, sous la direction de Michel Cadé. Avec un DVD du film La guerre est proche de Claire Angelini. Editions du Trabucaire. 180 pages, 25 euros.

De la chute de Barcelone à la Retirada, catalogue d’exposition sous la direction d’Eric Forcada. Editions Mare Nostrum. 127 pages, 25 euros.

Agusti Centelles (1909-1985), contient notamment les photos de la guerre civile et du camp de Bram. Editions Actes Sud. 258 pages. 55 euros.

La valise mexicaine, les négatifs retrouvés de la guerre civile espagnole par Capa, Taro et Chim. Editions Actes Sud. 592 pages. 85,20 euros.

Ulysse dans la boue (journal des camps français 1939-1944), par Jaume Grau. Préface, traduction et notes de Marie-Hélène Mélendez. Editions Mare Nostrum. 580 pages, 30 euros.

Sur internet :
Des ressources sur Francesc Boix et Josep Subirats au Musée d’Histoire de la Catalogne de Barcelone.
Musée mémorial de l’exil à La Jonquera, en Catalogne.
Le mémorial du camp de Rivesaltes, dans les Pyrénées-Orientales.

dimanche 20 septembre 2015

NON A LA CONTENTION !

La sangle qui attache tue le lien humain qui soigne.

En France, chaque jour, on enferme, on immobilise, on attache, on sangle, des personnes malades.

 

 

              NON A LA CONTENTION


Ces pratiques de contention physique d’un autre âge se déroulent quotidiennement dans ce pays. Ces pratiques dégradantes avaient quasiment disparu. Or les contrôleurs généraux des lieux de privation de liberté, Jean marie Delarue puis Adeline Hazan, l’ont constaté, elles sont désormais en nette augmentation, qui plus est banalisées comme des actes ordinaires.
Dans le projet de loi « de modernisation du système de santé » on lit même que ces actes auraient des vertus thérapeutiques !

Nous l’affirmons : Ces actes ne soignent pas.

Nous soignants, patients, familles, citoyens ne pouvons accepter que ces pratiques perdurent.
Les patients qui les ont subies en témoignent régulièrement, elles produisent un traumatisme à jamais ancré dans leur chair et dans leur cœur.
Dire non aux sangles qui font mal, qui font hurler, qui effraient plus que tout, c’est dire oui :
- C’est dire oui à un minimum de fraternité.
- C’est remettre au travail une pensée affadie, devenue glacée.
- C’est poser un acte de régénérescence.
- C’est trouver et appliquer des solutions humaines à des comportements engendrés par d’énormes souffrances, mais qui peuvent paraître incompréhensibles ou non traitables autrement.

 Or nous, nous savons que l’on peut faire autrement. Cela a été fait durant des décennies, cela se fait encore dans certains services.
Mais ce savoir faire est en train de se perdre au profit de la banalisation grandissante de ces actes de contention.
Nous l’affirmons : accueillir et soigner les patients, quelle que soit leur pathologie, nécessite d’œuvrer à la construction de collectifs soignants suffisamment impliqués et engagés dans le désir d’écouter les patients, de parler avec eux, de chercher avec eux les conditions d’un soin possible.
Un minimum de confiance, d’indépendance professionnelle et de sérénité est à la base de ce processus.

Or le système hospitalier actuel malmène et déshumanise les soignants.
L’emprise gestionnaire et bureaucratique envahit le quotidien : principe de précaution, risque zéro, techniques sécuritaires, protocolisation permanente des actes, réduction du temps de transmission entre les soignants etc… Elle dissout petit à petit la disponibilité des acteurs de soins : comment alors prendre le temps de comprendre, de chercher du sens, de penser tout simplement que le patient, si inaccessible soit-il, attend des réponses et des solutions humaines à même de l’apaiser.
Ce contexte nuisible trouve dans la banalisation des actes de contention physique sa traduction « naturelle », expression du désarroi et/ou du renoncement.
Repenser la formation, donner de toute urgence des moyens nécessaires à cette mission complexe et difficile est la moindre des choses et ouvrirait la voie à la réinvention de l’accueil et du soin.
Pensez-y. Qui d’entre nous supporterait de voir son enfant, ou son parent proche, ou un ami, en grande souffrance, attaché, ligoté, sanglé ? Qui accepterait de s’entendre dire que c’est pour le bien de cette personne chère ? Qui pourrait accepter un tel acte alors qu’il est possible d’agir autrement ? Car il est possible d’agir autrement !

Mesdames, messieurs les parlementaires, nous savons que parfois il vous faut beaucoup de courage pour élaborer des lois qui semblent aller à contre-courant des idées reçues ! La maladie mentale fait peur. Le traitement de différentes affaires tragiques, mais totalement minoritaires, par les médias alimente cette peur. Ne pas céder à cette peur nous revient, vous revient à vous les élus du peuple.

Il nous revient d’affirmer haut et fort qu’une vision sécuritaire de la psychiatrie va à l’encontre du besoin légitime de sécurité protectrice que soignants, patients et familles réclament.
Proscrire la contention physique permettra aux patients, aux familles, aux soignants de retrouver une dignité nécessaire et indispensable pour traverser les dures épreuves de cette souffrance psychique inhérente à l’humanité de l’homme.

 Rien n’est hors de portée de l’intelligence humaine ! Mesdames, messieurs les parlementaires ne laissez pas les patients soumis à des traitements qui ne sont pas des soins !

dimanche 13 septembre 2015

Contention : la dérive sécuritaire !

Par Eric Favereau (mis à jour à

«Mardi 23 juin 2014. Le patient est calme mais, par précaution, la chambre d’isolement est préparée pour le mettre sous contention s’il devient agressif.»

«Mardi 23 juin 2014. Le patient est calme mais, par précaution, la chambre d’isolement est préparée pour le mettre sous contention s’il devient agressif.» Photo Jean-Robert Dantou. Agence VU. (lire aussi en fin d'article.
Un collectif de psychiatres lance un appel contre cette pratique qui consiste à attacher les malades.
  • Psychiatrie: la dérive sécuritaire
Ce sont des mots terribles, à la hauteur des dérives qui traversent la psychiatrie. Et c’est un appel à y mettre fin.
«Des pratiques d’un autre temps, d’un autre âge se déroulent quotidiennement dans notre pays : celles de la contention physique», lâche le Dr Hervé Bokobza, un des fondateurs du Collectif des 39, longtemps directeur d’un établissement pour jeunes psychotiques. Cette figure du milieu poursuit : «En France, chaque jour, on enferme, on immobilise, on attache, on sangle des personnes malades. Ces pratiques inhumaines avaient quasiment disparu. Or, et les contrôleurs des lieux de privation de liberté l’ont constaté, elles sont désormais en nette augmentation et qui plus est banalisées, comme des actes ordinaires. Dans le projet de loi sur la santé, il est même écrit, non sans cynisme ou ignorance, que ces actes auraient des vertus thérapeutiques.»
  • Inefficacité

Pour lui, et pour quelques autres, cela ne peut plus durer. C’est pourquoi ils lancent un appel ce mercredi, lors d’un colloque au Sénat (1). «Dire non aux sangles qui font mal, qui font hurler, qui effraient plus que tout, c’est dire oui à un minimum de fraternité, c’est réaffirmer qu’il est possible de faire autrement. Dire non c’est remettre au travail une pensée affadie, devenue glacée, c’est poser un acte de régénérescence.»

A lire l'interview du député PS Denys Robiliard, qui a déposé un amendement pour encadrer les pratiques de contention en dernier recours 

 Aux yeux de ces psychiatres, il y a urgence car nous ne sommes plus seulement face à quelques dérapages isolés. «La contention est un indicateur de la bonne ou de la mauvaise santé de la psychiatrie, souligne le Dr Jean-Claude Pénochet, président du Syndicat des psychiatres des hôpitaux. Plus elle va mal, plus la contention sera utilisée.» Et c’est le cas. Tous les acteurs notent une progression des mesures de contention, avec les chambres d’isolement, des moyens pour attacher les malades, certains relevant une culture du personnel soignant qui a été modifiée.
La docteure Christiane Santos, secrétaire générale de l’Intersyndicale de défense de la psychiatrie publique, a mené une enquête qui a fait ressortir que la pratique de la contention est utilisée presque partout. Et n’est même plus débattue. Le Dr Thierry Najman, qui dirige un pôle important de psychiatrie dans un hôpital de l’Ile-de-France, sort un livre, Lieu d’asile (2), qui pointe ces dérives. Et surtout, au-delà des questions éthiques, il démontre leur inefficacité et leur incohérence.
A l’hôpital d’Etampes (Essonne) par exemple, sur neuf unités d’hospitalisation, huit sont des structures fermées. Pourquoi ? «Parce que c’est plus pratique.» De même, à Gonesse, Pontoise, Argenteuil ou Eaubonne (Val-d’Oise), la plupart des services le sont aussi. «Alors que ces décisions de privations de liberté ressortent d’une décision médicale, cette fermeture n’est de fait justifiée que pour des raisons dites de sécurité», écrit Thierry Najman.

 A lire, notre reportage de Blois à Paris, la psychiatrie au quotidien

Autre exemple, plus inquiétant, celui des détenus en prison transférés à l’hôpital psychiatrique, où ils vont connaître un régime hors de toute légalité : «Or ils ne sont plus prisonniers, ils sont patients. Ils sont pourtant mis en chambre d’isolement pendant toute la durée de leur hospitalisation. Et ils sont attachés.» Il cite l’un d’entre eux, contenu depuis des semaines. «Il se comparait à un corps dans un cercueil»,raconte le Dr Najman.
  • Violence

Même si la loi l’exige, il n’y a bien souvent aucune prescription médicale, ni pour la contention ni pour l’isolement. Le Dr Najman parle «de grande régression» et dénonce des «raisons invoquées […] tronquées». En effet, on justifie les services fermés par la crainte des fugues alors qu’il n’y en a pas plus dans les services ouverts :«Les notions de précaution et de sécurité pèsent de plus en plus dans l’organisation du système sanitaire, en violation de la dimension clinique qui insiste pour que les patients soient et doivent demeurer libres.» Un rapport récent de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) tempère par ailleurs la dangerosité de ces fugues : «Dans la grande majorité des cas, les malades fuguent à pied, en plein jour, par le portail central de l’établissement et, dans la quasi-totalité des cas, le retour est rapide et les fugues sans conséquence.»
«Le principal risque est de toujours vouloir se protéger»,note le Dr Najman qui montre dans son ouvrage combien les services fermés et la contention engendrent de la tension et de la violence. «La liberté de circuler est bafouée alors que c’est un droit, y compris pour les patients hospitalisés sans consentement», déclarait encore le contrôleur général des lieux de privation de liberté.
On en est là : des pratiques illégales et leur banalisation encore plus déroutante. Le Dr Bokobza lance, comme un défi : «C’est notre responsabilité de soignants, c’est celle de tout citoyen éclairé de s’opposer fermement à ces actes de contention qui déshumanisent les malades mentaux… Qui d’entre nous supporterait de voir son enfant ou son parent proche, ou un ami, en grande souffrance psychique, attaché, ligoté, sanglé, isolé ? Qui accepterait de s’entendre dire que c’est pour le bien de cette personne chère, alors qu’il est possible d’agir autrement ?» Et il déclarera, ce mercredi au colloque : «Mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes là. Ne pas céder à cette peur nous revient, vous revient à vous, les élus du peuple. Il nous revient d’affirmer haut et fort qu’une psychiatrie sécuritaire va à l’encontre des intérêts des patients et de la société dans son ensemble. Nous sommes persuadés que dire non à la contention, que proscrire cet acte redonnera confiance et dignité à tous les acteurs du système de soins et permettra que la citoyenneté retrouve sa raison d’être.»
Sera-t-il entendu ? Aujourd’hui, cette question tétanise tout le milieu de la psychiatrie.

(1) Colloque «39 alerte», organisé par le Collectif des 39 en collaboration avec l’association Humapsy et le collectif Le fil conducteur, sous le parrainage de la sénatrice (EE-LV) Aline Archimbaud. Rens. : www.collectifpsychiatrie.fr

(2) Lieu d’asile, manifeste pour une autre psychiatrie,de Thierry Najman, éd. Odile Jacob. Postface de Pierre Joxe.

Lire aussi le blog «Sur la diagonale du fou…» sur Libération.fr

Photo : Jean-Robert Dantou interroge les limites de la représentation photographique dans le champ de la psychiatrie, ainsi que nos propres représentations de la folie. Fruit d’une recherche de plusieurs années en collaboration avec une équipe de recherche interdisciplinaire coordonnée par Florence Weber, directrice du département de l’Ecole normale supérieure, le photographe de l’agence Vu publiera une trilogie à l’automne, Les murs ne parlent pas, aux éditions Kehrer.

Eric Favereau 
http://www.liberation.fr/societe/2015/09/08/contention-la-derive-securitaire_1378418

mercredi 9 septembre 2015

Le lac de Peirce : une métaphore de la conscience

 Le lac de Peirce : une métaphore de la conscience
samedi 22 août 2015, publié par Michel Balat

                Le lac de Peirce : une métaphore de la conscience

Extrait du Tome VII des Collected Papers of Charles Sanders Peirce
Traduction de Laurence Fanjoux-Cohen et Thomas Chevrier

7.553. Pour une fois, nous allons choquer les psychologues physiologistes en tentant non pas une hypothèse sur le cerveau mais en faisant la description d’une image qui correspondra point par point aux différentes caractéristiques du phénomène de conscience. La conscience est comme un lac sans fond dans lequel les idées sont suspendues à différentes profondeurs. En effet, ces idées constituent en elles-mêmes le milieu propre de la conscience. Les percepts seuls restent à la surface de ce milieu. Nous devons imaginer qu’il pleut continuellement sur le lac et que cette pluie ressemble au flux ininterrompu de nos perceptions. Toutes les idées autres que les percepts sont à plus ou moins grande profondeur et nous pouvons supposer qu’il existe une force de gravitation telle que plus les idées sont profondes plus le travail pour les amener à la surface sera important. Ce travail virtuel, que les mathématiciens appellent « les potentiels » de particules est le négatif de « l’énergie potentielle «  ; et l’énergie potentielle est la représentation du degré de vivacité de l’idée. Nous pourrions aussi bien dire que le potentiel, ou la profondeur, représente la qualité de concentration nécessaire pour distinguer l’idée à cette profondeur. Et on ne doit pas penser qu’une idée doit être réellement amenée à la surface de la conscience pour être discernée. L’amener à la surface de la conscience reviendrait à produire une hallucination. Non seulement toutes les idées ont tendance à graviter vers le néant, mais on peut imaginer que nombre d’idées réagissent les unes avec les autres selon des attractions sélectives. Cela illustre les associations entre les idées qui tendent à les agglomérer en idées uniques. De même que notre idée de distance spatiale consiste dans le temps qu’il faudrait, avec un effort donné, pour passer d’un objet à un autre, de même la distance entre les idées est mesurée par le temps qu’il faudrait pour les combiner. Ainsi si l’on cherche le terme français pour shark ou linchpin, le temps nécessaire pour retrouver le mot oublié dépend de la force d’association entre les idées des mots anglais et français et de circonstances qui naissent de l’écart entre les deux mots. Ceci, je dois l’avouer, est excessivement vague ; aussi vague que le serait notre notion de distance spatiale si nous vivions au sein de l’océan et étions démunis de quoi que ce soit de rigide pour prendre des mesures, étant nous-mêmes de simples portions de fluides.

 7.554. La conscience est plutôt comme un lac sans fond dans lequel les idées sont suspendues à différentes profondeurs. Les percepts seuls restent à la surface de ce milieu. La signification de cette métaphore est que les idées qui sont les plus profondes ne sont discernables que par un grand effort et maitrisables par un encore plus grand effort. Ces idées en suspens au sein de la conscience ou plutôt constituant elles-mêmes le fluide sont attirées les unes les autres par des habitudes et des dispositions associatives, -ces premières en association par contiguïté, ces dernières en association par ressemblance. Une idée qui est près de la surface n’attirera une idée qui est très en profondeur que dans les rares cas où l’action s’exercera suffisamment longtemps pour que cette dernière soit amenée à un niveau de discernement aisé. Dans le même temps, la première s’enfonce dans une conscience imprécise. Il semble qu’il y ait un facteur comme une force d’entraînement qui fait que l’idée qui était originellement imprécise devienne plus vivace que celle qui l’a attirée. De plus, l’esprit n’a qu’une surface limitée à chaque niveau ; dès lors faire remonter une masse d’idées implique inévitablement en faire descendre d’autres. Un autre facteur encore semble être une sorte d’agglomération ou d’association avec toute idée vivante, comme c’est le cas pour ces idées que nous nommons des buts. Selon ce principe, ces idées visant un but déterminé auront particulièrement tendance à émerger et à être retenues à la surface par le flux des perceptions entrantes et à retenir ainsi avec elles toutes les idées qui leur seraient associées. Le contrôle que nous exerçons dans le raisonnement de nos pensées consiste à vouloir maintenir à la surface certaines pensées où elles peuvent être examinées attentivement. Les niveaux des idées facilement maitrisées sont ceux qui sont si près de la surface qu’ils sont fortement affectés par nos buts immédiats. Cette métaphore est vraiment pertinente.

vendredi 4 septembre 2015

PLAIDOYER POUR UNE BIENTRAITANCE UNIVERSELLE DE L'HUMAIN

En voyant les images de ses femmes italiennes qui se jettent devant les bus des migrants pour les empêcher de quitter l'Italie.
En voyant les images de ses femmes italiennes qui se couchent sur les rails pour empêcher les trains de migrants de circuler.
Je pense à l'Italie de Mussolini, aux chemises noires, au populisme qui bombe le torse, à la face sombre de l'humain qui se révèle au grand jour !

En voyant les images que les médias nous jettent en pâture tous les jours, les  milliers de migrants refoulés par la police hongroise et conduits  dans des camps !
L'Histoire de répète, nous n'avons jamais cesser de construire des camps !

En voyant le déferlement des réfugiés en Europe, et la réaction xénophobe, la peur de l'Autre, le rejet d'une partie des populations européennes, nous sommes devant une situation d'urgence, demain c'est aujourd'hui...
Les gouvernements européens joue la montre, ils ne seront jamais d'accord, il n'est pas question de quota, ce n'est pas du bétail !
Alors, c'est à nous citoyens de décider de notre engagement !


 En voyant l'image de ce petit enfant mort, seul sur la plage dans les bras d'un garde-côte turc, alors j'ai pleuré...

En voyant les images des familles allemandes, islandaises, suédoises, espagnoles..., qui accueillent chez elles des réfugiés tout espoir n'est pas perdu.

La Bientraitance au quotidien, c'est d'arrêter de propager un discours haineux, raciste, populiste de rejet, d'exclusion de l'Autre, de l'étranger comme cause de notre malheur.
Nous le savons tous le populisme pour être populaire cherche toujours une cible, un bouc-émissaire pour rassembler, cette cible c'est l'étranger !

Au cours de l'Histoire de notre pays (la France), les juifs, les espagnols, les pieds-noirs et les harkis ont fait les frais de cette méthodologie de l'exclusion et de parcage dans des camps (cf. La France des Camps de Denis Peschanski, Guallimard, 2002).

La Bientraitance a-t-elle à voir avec la compassion, je le suppose et je l'espère !
La Bientraitance commence par soi-même, par l'estime de soi, et de ce que je peux apporter au quotidien à l'autre, même de façon infime, un sourire, une parole aimable, une pensée positive...

Nous sommes citoyens du monde et la  terre ne nous appartient pas.
Nous sommes tous des migrants nés quelque part et nous avons dû affronter le rejet des populations en place.
Alors, maintenant que nous sommes installés, ne rejetons pas les  nouveaux migrants.
Nous n'avons aucune légitimité pour le faire !

Signez la pétition : Nous voulons accueillir les réfugiés
http://accueilrefugies.wesign.it/fr

Jean-Louis AGUILAR-ANTON / Citoyen du Monde

mardi 1 septembre 2015

SENTIMENTS GERIATRIQUES REVISITES…



Une femme qui après avoir pris le bus attend les horaires de visite pour voir son mari en bas de la maison de retraite : elle y passera la journée pour rentrer chez elle dans la maison trop grande et vide !
Combien d’histoires de vie semblables sont-elles similaires ?
Cette femme, Mme D. m’attend dès le premier jour de mon arrivée dans mon nouveau service ; ses propos furent "maintenez mon époux en vie !". Ce patient-résident hémiplégique et aphasique a une autonomie passive de type lit-fauteuil. Il comprend néanmoins et s’exprime avec une ardoise . Ne demandons plus à ce type de malades s’ils vont bien… ils vont à moitié ! Son épouse refuse de sortir avec M D. dans le parc. Deux mois plus tard voit se déclarer chez elle un cancer évolué dont elle décèdera deux ans plus tard. Sa fille unique refuse alors que l’on dise la vérité portant intelligible pour lui à son père. Elle reprend le même itinéraire en talons aiguilles. Nous apprenons alors que sa mère n’ouvrait plus les volets de la maison vide. Les commerçants retraités avaient été séparés par la maladie.
Nous pourrions être condamnés par ce malheur, penser comme le poète que « le bonheur c’est du chagrin qui se repose »…qu’un homme n’est perdu que lorsqu’il s’abandonne et croit s’innocenter par le malheur . Il ne cesse alors de se complaire dans ses  tourments, il y joue une comédie sacrificielle qu’il retourne contre autrui. Se croyant  « purifié » par le malheur il condamne les autres : près de lui les joies sont coupables et le bonheur n’est qu’un aveuglement  égoïste.
Il n’y a qu’un seul « péché »mortel, c’est de renoncer au bonheur, car nul n’y renonce pour soi, qui n’en détruise selon sa part les conditions pour ceux dont il est proche. Où l’on voit que c’est dire une seule et même chose quand on dit : il faut aimer et être heureux, il  faut s’aimer soi même et vouloir être heureux.
L’épilogue est « heureux » : la petite fille de M D viendra le jour de son mariage en robe blanche avec son mari dans la chambre de son grand-père…

Par le Dr François de la Fournière, 
Médecin gériatre, écrivain, membre de l'ARAT.

Je remercie le Dr de la Fournière pour sa participation à Blogarat.