vendredi 12 décembre 2014

La dignité de penser par Roland GORI

Au nom d’un « rationalisme économique morbide » une nouvelle colonisation des esprits envahit la planète. Avec ses agences d’évaluation et ses hommes de main, cette « religion du marché » interdit de penser le monde, notre monde, autrement que comme un stock de marchandises ou de produits financiers.
Pour réaliser cette nouvelle manière de civiliser les mœurs il fallait faire chuter la valeur de l’expérience et celle du récit – de la parole – qui la transmet. En faisant baisser le cours de la parole au profit de l’information, de sa part la plus technique et mesurable, nous perdons le monde commun, nous perdons notre monde. Et plus encore en Occident, nous nous habituons à lâcher la démocratie pour l’ombre d’une technocratie qui organise insidieusement nos servitudes volontaires.

Cet ouvrage invite au retour du politique pour retrouver les conditions sociales et culturelles permettant de penser, de juger et de décider. Cela exige que soit d’abord interrogé le statut du savoir dans la culture, son rapport à l’expérience et aux pratiques sociales. Mais comment retrouver aujourd’hui la dignité de penser dans une culture qui ignore la légitimité du savoir du conte, du rêve, du jeu et de leurs récits ? La France qui se lève tôt a-t-elle encore le temps de raconter sa vie, son histoire et ses rêves ?
Il a récemment publié :
Logique des passions(2002),
La Santé totalitaire (avec M.-J. Del Volgo, 2005),
 Exilés de l’intime (avec M.-J. Del Volgo, 2008),
La Preuve par la parole (2008),
 L’Appel des appels Pour une insurrection des consciences (avec B. Cassin et Ch. Laval, 2009),
 De quoi la psychanalyse est-elle le nom ? Démocratie et subjectivité(2010),
La folie évaluation (avec A. Abelhauser et M.-J. Sauret, (2011).
Roland Gori est psychanalyste et professeur émérite de Psychopathologie clinique à l'université d'Aix-Marseille. Il est l'initiateur avec Stefan Chedri de l'Appel des appels. Il a publié de nombreux ouvrages autour de la médicalisation progressive de nos existences. Il pointe la nécessité de penser à cette médicalisation généralisée qui s’imposent peu à peu dans nos vies sous la conjonction d’un pouvoir politique qui se protège, d’un pouvoir économique qui se développe et d’une partie du corps médical qui fuit ses responsabilités. Le risque est ainsi partout. Il suscite des procédures d’assurance pour se protéger à l’infini, et entraîne également des prescriptions médicamenteuses et des conduites qui méritent qu’on y regarde à deux fois.
Est-ce que tout le monde doit entrer dans la norme, faut-il accepter  une certaine individualité, voire une certaine marginalité. En s’appuyant sur sa pratique quotidienne, ses réflexions et ses lectures approfondies des grands maîtres tels que Canguilhem, Beck, Roland Gori nous démontrera comment les techniques de psychiatrie « actuarielle » en particulier sur le risque de récidives des criminels résonnent avec la phrase de Paul Valéry : « On ne peut entrer dans l’avenir à reculons ».
Roland Gori

Mis en ligne avec l'aimable autorisation de Roland Gori

Jean-Louis Aguilar-Anton / Art'Bloguer

mardi 9 décembre 2014

GR1 : Théorie et clinique en Art-thérapie et médiations thérapeutiques

Le GR1* "Théorie et clinique en Art-thérapie et médiations thérapeutiques" s'est réuni  le samedi 18 octobre à la MVA de Béziers.

Présents :   Geneviève Dindart, Cynthia Serbert, Jean-Louis Aguilar, Gaëlle Chamboncel.

Depuis le début d’année 2014, le groupe travaille sur le « Manuel des médiations thérapeutiques », d’Anne Brun, Bernard Chouvier et René Roussillon, 2013, Dunod, Paris.

Le choix de cet ouvrage est essentiellement centré sur une volonté de travailler une théorisation pour une pratique psychanalytique des groupes, et notamment les médiations thérapeutiques groupales. Ce choix a pour objectif de clarifier et d’affiner notre pratique en institution ou en libéral.

Ce que nous avons retenu :

Lors de notre première rencontre nous avons pu échanger autour d’une métapsychologie de la médiation et du concept de Medium malléable cher à René Roussillon. Concept qui s’appuie sur la théorie de la transitionnalité élaboré par D. W. Winnicott (Jeu et Réalité). Le médium Malléable désigne en fin de compte un objet existant concret qui prendrait « une forme différente selon la manière dont on s’en saisit ».

Les médiations thérapeutiques permettent, de prime abord, un travail thérapeutique en deçà des processus de symbolisations secondaires (le langage) et de figurer des expériences sensorielles, affectives, et motrices (« sensori-affectivo-motrices » comme le nomme l’école de Lyon). Elles offrent, ensuite, la possibilité d’une verbalisation associative (qui s’appuie, pour certains d’entre nous, sur la règle fondamentale formulée en psychanalyse), en tenant compte du lien transférentiel à l’œuvre dans les ateliers thérapeutique de groupe.

Pour Anne Brun, il s’agit donc de privilégier l’expression non verbale et corporelle sans omettre la place essentielle de la verbalisation qui est indispensable dans l’utilisation des médiations thérapeutiques appartenant au champ de la psychothérapie analytique.

Groupes à création  vs  groupes thérapeutiques à médiation

Lors de notre dernière rencontre nous nous sommes longuement penchés sur le tableau établit par Anne Brun (Manuel des médiations thérapeutiques p. 98). Elle distingue clairement « les groupes à création »  des « groupes thérapeutiques à médiation ». Nous avons noté que le deuxième groupe est celui qui nous concerne dans notre travail thérapeutique. Dans l’espace thérapeutique, il est question d’ « intime » des personnes participants, et de la production d’objet. L’ « intime » à l’œuvre dans l’atelier est la raison de la non-exposition des productions effectuées en atelier. L’atelier à médiation thérapeutique est le lieu d’où émerge le lien transféro-contre-transférentiel. Ainsi, « La production prend sens exclusivement dans la dynamique transférentielle ». 

Cette présentation nous a permis d’échanger sur ce qu’est l’art-thérapie en institution et de mettre en lumière les différences notoires entre les différents ateliers existants (atelier « art-thérapie », « atelier d’expression libre », « atelier marionnette », « atelier de création » avec ou  sans la focale psychanalytique).

Statut et destin de l’objet créé

Nous avons questionné le statut de l’objet créé, c’est-à-dire du médium malléable. L’objet crée est empreint du lien transférentiel du sujet avec le thérapeute mais également du lien transférentiel groupal. (Anne Brun dit qu’il est « le support des nœuds transféro-contre-transférentiels »).
Il ne s’agit pas de donner trop d’importance à l’objet créé, il s’agirait plutôt d’accorder une attention particulière aux effets du transfert du sujet et du contre transfert à l’œuvre chez le thérapeute. 

En définitive, Il appartient au thérapeute de décider du destin de l’objet, cela    dépend bien sûr du contexte institutionnel, (hospitalisation ou atelier en cs externe,). Certains optent pour une conservation, d’autres pour une séparation d’avec l’objet crée. « Il n’existe pas de solution magique à ces questions, ce qui semble important est de bien discuter au préalable les enjeux des choix institutionnels et de pouvoir les justifier ».

Pour conclure, Nous avons mis l’accent sur la nécessité de poser un cadre rigoureux traçant les limites à l’intérieur desquelles toute forme de création devient possible, permettant dans un deuxième temps de faire émerger du sens.

Le GR1 est animé par Gaëlle Chamboncel / Psychologue et art-thérapeute.

*Les GR ne sont pas que des sentiers de grande randonnée, ce sont aussi des groupes de recherche de l'association ARAT.
Ils se réunissent une fois par an au sein du CSRA (Comité Scientifique et de Recherche Associative).
Contact : asso.arat@gmail.com

dimanche 7 décembre 2014

HUMAPSY

HUMAINS imPATIENTS pour une Psychiatrie HUMANISTE

Qui sommes nous ?


HumaPsy est une association de type loi 1901 créée en décembre 2011 par des patients suivis dans un dispositif inspiré de la psychothérapie institutionnelle. Nous avons été rejoints par de nombreux citoyens ayant d’autres expériences de la psychiatrie et inquiets, comme nous, pour l’avenir des prises en charge de la souffrance psychique.

La loi adoptée le 5 juillet 2011, et révisée superficiellement depuis, permet désormais aux psychiatres d’imposer en dehors de l’hôpital des programmes de « soins » sous contrainte. Aucun antécédent judiciaire n’est nécessaire pour cela. Ce dispositif sécuritaire est liberticide bien sûr, mais surtout anti-thérapeutique ! Ce sont les premiers concernés, qui vous le disent… On n’aide pas quelqu’un à sortir du déni de ses troubles par la contrainte. C’est un cheminement qui ne peut se faire que dans une relation de confiance, grâce à des lieux d’accueil bienveillants, vivants et respectueux, à l’extérieur de l’hôpital. Laisser croire qu’une psychiatrie qui a désormais les moyens légaux d’imposer les traitements médicamenteux en dehors de l’hôpital remplirait mieux sa mission est un leurre, car ils ne sont pas suffisants.
La psychiatrie dite moderne, qui se réclame d’avancées scientifiques dans le domaine des neurosciences, donne de l’humain (déterminé par ses gènes) une définition très réductrice et développe une conception de la maladie mentale qui se désintéresse de l’être humain qui la traverse. L’idée même qu’un soin relationnel existe, lui est étrangère. Comment s’étonner alors que le recours à la contention, ou aux chambres d’isolement soient loin de disparaître. L’hôpital psychiatrique qui devrait être rassurant (savoir qu’on peut trouver ou demander une protection si on ne va pas bien) incarne de plus en plus la sanction pour les « mauvais » malades.
Notre association veut donner la parole aux fous, ou ceux qui sont considérés comme tels, en soutenant leur expression sous toutes ses formes, afin qu’elle soit prise en considération.
La première déstigmatisation dont nous avons besoin c’est que l’on reconnaisse nos droits fondamentaux, et nos capacités à évaluer les prises en charges et les politiques qui nous concernent !


contact : humapsy@mailoo.org

N’hésitez pas à nous contacter pour tous renseignements complémentaires.
Nous devons prendre part aux débats et nous faire reconnaître comme interlocuteurs légitimes par les parties concernées.

Mis en ligne avec l'aimable autorisation d'HumaPsy

vendredi 5 décembre 2014

Groupe de Recherche 2 : CO-VISION en Art-thérapie

Présents : Bénédicte Carrière, Purita Munoz, Caroline Germain, Amparine Tubau, Jean-Louis Aguilar.

Cette deuxième séance du groupe de "co-vision et analyse des pratiques en art-thérapie" s’est tenue le dimanche 21 septembre de 10 h à 17 h à Montpellier.
Il a commencé par un atelier d'écriture et de théâtre animé par Amparine.
A 14 h Jean-Louis nous a rejoint pour nous communiquer le cadre de travail des groupes de recherche au sein de l’ARAT. Il s'en est suivi une discussion sur le métier de l’art-thérapeute (son statut, sa reconnaissance, son évolution…). Nous avons également précisé ensemble ce que nous entendions par un groupe de co-vision en art-thérapie et ce que nous en attendions

Bénédicte, dans le texte suivant, résume le résultat de nos échanges à ce propos :

“Comme pour tout professionnel, l'art-thérapeute a le besoin et le souci d'échanger avec d'autres professionnels, - pairs ou praticiens référents - pour évoluer et mieux comprendre sa pratique, réfléchir, analyser, prendre du recul, enrichir sa vision et  acquérir une meilleure compréhension des enjeux de sa profession.
En art-thérapie, une des garanties fondamentales d'un travail de qualité est la réflexion continue sur la pratique.
Quelle que soit la forme que prend ce travail indispensable, l'art-thérapeute devra choisir le cadre le plus adéquat à sa pratique.

En ce qui concerne ce groupe, nous avons effectué des choix de fonctionnements qui se dérouleront le long de la journée de co-vision.
Un des art-thérapeutes proposera le matin un dispositif créatif « à la manière d’un dispositif en séance ». Si nous demandons aux patients une confiance relative à un supposé savoir, il nous paraît cohérent de pouvoir, entre pairs, pouvoir avoir un regard critique et constructif de la manière dont se déroule une séance chez l’autre. Il n’est absolument pas question de remise en question des différents types de pratique, mais plutôt d’un regard qui fasse tiers, bienveillant et respectueux.
Le repas de midi sera prétexte à un retour sur ce qui s’est produit durant cet atelier, et à entendre comment chacun a vécu cette expérience. Nous nous posons la question de ce qui permet à un patient de « rentrer en création » et ce qui fait qu’un changement se produit (ou non) entre les séance, jusqu’à lui apporter un mieux être.
L’après-midi sera consacré à une difficulté ou un questionnement rencontrés en séance, à partir d’un cas clinique. »
Nous avons décidé de limiter à 7 le nombre de participants, tous art-thérapeutes en activité et membres de l'association ARAT, qui s’engagent sauf événements majeurs, à être présents lors des réunions programmées à l’avance. Les deux prochaines rencontres sont d’ailleurs fixées au 30 novembre et au 15 janvier.

Lorsque Jean-Louis est parti vers 16 h nous avons continué cette journée de travail par le débriefing de l’atelier du matin. A travers cette expérience, nous avons pu échanger sur nos pratiques, les mettre en perspective par rapport à notre propre vécu de l’atelier et faire un retour à Amparine sur sa proposition. J’en profite d’ailleurs pour la remercier de nous avoir emmener dans ce voyage créatif à travers les mots et le jeu théâtral. Les rôles se sont inversés le temps de cette matinée et au delà des réflexions que cela a suscité sur notre métier, le plaisir était bien présent, me semble t-il…

Caroline Germain, art-thérapeute et animatrice du GR2 : Co-vision et analyse des pratiques en Art-thérapie.
Contact : asso.arat@gmail.com