dimanche 9 novembre 2014

ALERTE... par Joseph ROUZEL

Joseph ROUZEL est Directeur de PSYCHASOC à Montpellier.
Institut Européen Psychanalyse & Travail Social.

J’ai été diplômé comme ES en 86. J’avais déjà un certain âge et pas mal bourlingué:communauté en Espagne sous le règne de Franco, premiers accueils d’enfants en difficulté. Ce qui m’a poussé à penser la clinique éducative et la politique comme intimement liés. Il a fallu partir, menacés de mort après l’assassinat de Carrero Blanco, le premier ministre, en 73. Puis nous avons ouvert avec ma femme Geneviève un des premiers lieux d’accueil dans le Gers. Nous avons rédigé un texte paraphé par le Préfet, précisant les engagements de part et d’autre. L’agrément comme « ferme thérapeutique » portait sur l’accueil de 9 enfants, adolescents ou adultes. J’y ai appris l’incontournable nécessité d’une clinique éducative du quotidien. Le Docteur Jean Oury qui vient de nous quitter à 90 ans le 15 mai dernier, deux jours avant de décéder lançait encore aux équipes soignantes : le quotidien, le quotidien, ne lâchez pas, c’est là que ça se passe ! Un peu plus tard j’ai mené une enquête pour le Ministère des Affaires Sociales sur ce type de prise en charge, qui a participé en 2002 à sa reconnaissance dans les textes. En formation à Saint Simon à Toulouse j’ai passé 3 années fabuleuses, à mettre des mots sur ce que j’avais vécu pendant ces années d’apprentissage d’un métier que comme beaucoup j’ai d’abord acquis « sur le tas ». On appelle ça de la théorie, ce qui n’est après tout qu’un point de vue (en grec theoria, que l’on trouve chez Platon, et qui signifie avant tout : contemplation !). J'y ai fait de belles rencontres de passeurs: Maurice Capul, François Tosquelles … J’ai exercé plusieurs années à Toulouse auprès de psychotiques adultes et enfants, de toxicomanes et de jeunes désinsérés. Puis je me suis consacré à l'enseignement. Formateur aux CEMEA de Toulouse, puis à l’IRTS de Montpellier, j’ai créé en 2000 l’Institut européen psychanalyse et travail social (PSYCHASOC1). J’étais en désaccord avec ce que je voyais déjà poindre en formation : un effacement de la clinique au profit de savoirs savants qui encombrent les pensées et les actes; un formatage visant à modeler les gardes chiourmes d'une société de contrôle, comme disait Michel Foucault. Sur le plan universitaire, j'ai suivi un chemin buissonnier qui me va bien:Maîtrise d'anthropologie à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales 2; DEA en philosophie et psychanalyse; thèse de doctorat, non soutenue, en psychanalyse 3

Pourquoi raconter tout ça ? Papy fait de la résistance ? Oui et je suis en colère. Ce que nous avons construit durant des années, à bas bruit, en tâtonnant, chacun apportant sa pierre, est jeté aux orties, comme une vieille ferraille. Le positionnement d’un travailleur social au plus près des difficultés des usagers (parfois bien usagés !), la prise en compte de chacun un par un, le développement d’une clinique du sujet et de son insertion dans la communauté des hommes, le questionnement permanent des dimensions institutionnelles, politiques et éthiques d’un acte qui ne se soutient que d’une rencontre humaine. La dignité humaine, voilà ce que nous avons défendu pendant des lustres sur le terrain et en formation. Puis ça s’est déglingué. Sous les coups de boutoir d’une idéologie qui ne dit pas son nom, le capitalisme, et qui s’avance masqué sous les oripeaux d’un socialisme néo-libéral, cette construction fragile, où l’humain est au cœur du métier, vole en éclats. Le bras armé de ce système qui ravage la planète et toute forme de lien social promeut une marchandisation généralisée de toutes les activités humaines. Si dans notre secteur nous nous pensions à l’abri, détrompons-nous.

Alors l’heure est grave. J’en voudrais pour preuve les textes récents sur la prise en charge des autistes, balayant tout ce qui s’est mis en œuvre en référence à la psychanalyse, au profit de méthodes cognitivo-comportementales pavloviennes. Depuis plus de 60 ans des professionnels éducatifs, soignants, médicaux œuvrent au quotidien auprès d’autistes. Ils s’appuient sur la psychanalyse, la psychiatrie humaniste, la psychologie clinique, la psychothérapie institutionnelle, où le sujet, au-delà de son symptôme, est au cœur de la prise en charge. Le symptôme fait alors signe d’un sujet et de sa position dans son rapport à autrui et non d’un dysfonctionnement à éradiquer, corriger, redresser. 4
En formation, après moult changements ces dernières années, les projets de démantèlement sont déjà dans les tuyaux, sans concertation avec les professionnels. 5. Le rapport Dubouchet et Eksl présenté à la CPC en décembre dernier fait froid dans le dos et rejoint d'autres préconisations, notamment celles d'UNAFORIS: produire des diplômes généralistes serait nier la spécificité de chaque métier. Le travail social c'est un peu comme le bâtiment, ce n'est pas un métier, mais un ensemble de corps de métiers qui chacun apporte son savoir-faire. Il s'agit alors plus de coordonner que de niveler. Si les électriciens se mettent à jouer les plombiers, il risque d'y avoir de l'eau dans le gaz!
L’industrialisation du champ social, à travers des technologies de contrôle rétrogrades (démarche-qualité, normes iso, évaluations quantitatives, audits en tous genres…) gagne du terrain et pousse à bout les professionnels. Ils ne seraient plus que les exécutants (autant dire les galériens) de politiques sociales elles-mêmes sous la coupe de financiers voraces : il y a encore du fric à se faire dans le secteur social, chantent les fonds de pension! Ne parlons pas des Etats Généraux du Travail Social où les travailleurs sociaux sont dramatiquement absents. ça se trame dans leur dos. Un peu à la façon dont certains établissent des projets éducatifs dit « personnalisés» sans aucune concertation avec les usagers. C'est à la mode: on nous veut du bien.

Bref, soit on sombre dans le désespoir et la plainte ; soit on entre en résistance. Une résistance qui ne soit pas nourrie de stérile opposition, mais inventive d’horizons nouveaux. Il est grand temps de clamer à qui de nos dirigeants ne veut rien entendre quelles formations nous voulons pour quel travail social dans quelle société. Dans mon métier de formateur je me déplace dans nombre d’établissements sociaux et médico-sociaux. Je suis effaré de voir des collègues muselés par des directions égarées par les sirènes d’un management inhumain ; cassés dans leurs projets et leurs prises de risque ; privés d’espaces de parole et d’élaboration ; à bout de souffle. Mais je rencontre aussi des équipes en lutte, debout, arrimées aux derniers bastions syndicaux qui ne se sont pas endormis. Toute la question aujourd’hui est de fédérer ces luttes.

L’humain n’est pas une marchandise ; le travail social non plus.
Joseph ROUZEL, Rouzel@psychasoc.com

1 http://www.psychasoc.com
2 Ma recherche a été publiée sous le titre de Ethnologie du feu.
Guérisons populaires et mythologie chrétienne. L'Harmattan, 1996.
3 Thèse qui fera l'objet d'une publication prochainement sus le titre de : La lettre de l'inconscient.
4 Voir l’Appel des appels ; la Nuit Sécuritaire
5 Voir le collectif Avenirs EDUCS et l’ONES (Organisation nationale des éducateurs spécialisés) qui luttent contre cet abus de pouvoir.

Mis en ligne avec l'aimable autorisation de l'auteur.

jeudi 6 novembre 2014

L’EXPÉRIENCE CRÉATRICE DANS LE SOIN ANALYTIQUE par Guy LAFARGUE

Le jeu de la création et de l'analyse [1]

Il me faut donc maintenant définir le cadre praxique que j’ai construit, qui a constitué mon armature théorique dans la mise en place des Ateliers thérapeutiques d'Expression que j’ai animé dans le premier hôpital de jour de la région Aquitaine, puis à l’hôpital psychiatrique Charles Perrens de Bordeaux dans le service du Docteur BLANC entre 1972 et 1982. Ce cadre est aujourd’hui identifiable comme un des modèles du travail analytique/thérapeutique, alternatif aux modèles nourris de la pensée fondatrice freudienne et de ses dérivés. J’ai nommé ce cadre tantôt “EXPRESSION CRÉATRICE ANALYTIQUE”©, tantôt “ART CRU” selon le contexte de mes interventions : Ateliers thérapeutiques, formation, développement personnel.

Dans ma pratique analytique, j'ai placé au centre de la dynamique métamorphique le jeu de création. La dynamique métamorphique, c'est ce travail de passage d'un être potentiel en devenir à un être actuel, inscrit dans la réalité, quels que soient les accidents affectifs auxquels a été exposée sa personne.

La métamorphe est le processus de transformation, d'actualisation des potentialités humaines, essentiellement de notre potentiel de santé affective et des capacités de résilience inscrites dans notre dot individuelle biologique, affective, psychique et sociale.

Les pensées que je soutiens ici sont l'aboutissement de quarante cinq années d'engagement soutenu, en premier temps dans l’enceinte psychiatrique dont j’ai fait fructifier les dividendes extraordinaires, puis dans les champs de la formation de praticiens d'Ateliers d'Expression Créatrice Analytiques ©, et dans celui de l'analyse individuelle de personnes en grande souffrance affective. Dans cet itinéraire, j'ai progressivement expérimenté, compris, élaboré et soutenu dans mon action professionnelle, cette idée majeure selon laquelle l'expérience créatrice est l'épicentre tectonique du travail de la constitution de l'être-sujet. Et que ce mode d’expérience n’a absolument rien à voir avec l’art.

Épicentre tectonique, cela signifie concrètement pour moi le centre de fermentation des matières affectives qui gouvernent inéluctablement notre histoire singulière, et leur élaboration en une palette de  représentations assimilables par la perception dans le jeu de la création.

L'expérience créatrice est la modalité fondamentale de l'action par laquelle l'être humain peut se construire et se signifier en tant qu'humain. Il ne peut se construire comme sujet, c'est à dire comme auteur de ses actes (comme sujet du verbe), comme fondateur de son humanité, que dans cette modalité de l’expérience. Ceci est essentiellement vrai pour les utilisateurs des soins en psychiatrie, mais d’abord pour toute personne en grande souffrance affective.

Le "devenir sujet" est le travail singulier qui nous incombe en tant qu'être humain. C'est à dire en tant qu'auteur désirant/consentant du travail d'actualisation de nos potentialités. Cela suppose de la part de la personne de résoudre de manière frontale, un certain nombre de souffrances affectives invalidantes de notre humanité.

                            L’Art CRU comme cadre institué

L’expression Art CRU désigne un cadre expérientiel/analytique institué pour le déclenchement et le développement de l'expérience créatrice en tant qu'elle est de manière fondamentale le lieu d'être où se constitue le sujet. Art CRU comme expérience à proprement parler æsthétique, c’est à dire profondément  ouverte engagée dans et par la pensée sensible.

Si Art CRU est un cadre construit, sa structure n’est pas pour autant figée en une institution cernée par des règles intangibles. Il s’agit bien d’un cadre, certes, mais d’un cadre à structure flexible (pour reprendre et honorer l’expression du Professeur Max PAGÈS, mon passeur dans le travail analytique), dont le jeu harmonique d’élaboration se poursuit tout au long de l’expérience créatrice elle même. L’institution elle-même est un fruitlieu de création. L’Expérience en est le mode opérant, son lieu d’être.
J’utilise explicitement le terme expérience dans la raisonnance anglo-saxonne, winnicottienne, resserrée autour du terme expériencing, c’est à dire comme processus de l’acte (acting) dans son développement signifiant. C’est à dire de l’acte en cours comme précipité, comme condensation…du Désir. Le Désir étant ici ce qui du vide donne lieu à la création d’un mouvement et d’une forme. En ce sens, je suis foncièrement  expériencialiste. Merci à mes maîtres en pensée : Frédérick NIETSZCHE, Carl ROGER’S, Donald WINNICOTT et Ronald LAING.

Pour moi, donc,  quatre déterminations fondamentales imprègnent et irriguent mon expression professionnelle et personnelle : l’expérience, la création, l’analyse, la relation, quatre concepts expérientiels qui fondent la structure kaléidoscopique du titre que j’ai donné par ailleurs à ma réflexion :

EXPÉRIENCE CRÉATRICE / RELATION ANALYTIQUE
EXPÉRIENCE ANALYTIQUE / RELATION CRÉATRICE
DANS L’INSTITUTION DE SOIN

L’Expérience est le lieu opératoire de tout processus de transformation dynamique de la personne. Aucune transformation significative satisfaisante de la personne ne peut procéder d’une démarche intellectuelle (enseignement), ni de l’identification mimétique à une école de pensée (même et peut être surtout lorsqu'elle est métapsychologique), ni d’une idéologie des apprentissages comportementaux et du renforcement conditionnel. Encore moins du traitement des symptômes produits par la souffrance affective au moyen des molécules psycholeptiques ou des prescriptions arthopédiques.

L'analyse :

Le marqueur instituant de ce cadre expérientiel est donné par le terme "analytique".
L’expérience analytique est la "matière" et la finalité de toute rencontre professionnelle entre l'analyste et la personne en demande de résolution de ses souffrances affectives invalidantes.

J'ai choisi une fois pour toutes d'inscrire  le terme "analyse" dans la filière étymologique.
Le mot analyse renvoie au mot grec analuein qui veut littéralement dire résoudre. Cela  décentre de façon significative l'induction freudienne qui circonscrit le travail analytique à celui de la mobilisation anamnétique par le procédé des associations psychiques. Et en vieux français, résoudre est  porteur du mot souldre qui signifie : payer le solde. Pour ce qui nous concerne, en lacanien simplifié : traiter le contentieux que nous entretenons avec les figures affectives originaires, avec les imagos.

La dimension créatrice de la relation analytique - et la dimension créatrice dans l'expérience analytique - sont la condition nécessaire et suffisante d’actualisation du travail métamorphique. La dimension Créatrice s’oppose radicalement ici à la dimension instrumentale qui gouverne largement le discours institutionnel de la psychiatrie (Tosquelles, Oury, Gentis…au secours!) et dans une certaine mesure, celui de la psychanalyse.
         
          La relation qui s’instaure entre les deux partenaires du travail analytique constitue l’objet de la communication analytique…de toute communication analytique. Elle est à la fois produit de la relation affective entre deux subjectivités interagissants et productrice d'une matière affective singulière et de ses efflorescences psychiques. Elle constitue une scène privilégiée des mouvements émotionnels, et ce, quel que soit le contrat passé entre analyste et analysant : formation, thérapie ou éducation.

Le   cadre  inaugural   de  l’Atelier
d’Expression   Créatrice  Analytique


Cinq règles basiques définissent le mode de structuration de l’expérience de l’Atelier d’Expression Créatrice Analytique par le praticien :

1°) L’ énonciation inaugurale de l’invitation  à centrer l’expérience créatrice sur la formulation (sur la mise-en-forme) de ce qu’ éprouve, ressent, conçoit (manuellement et imaginairement) le sujet dans la situation singulière de l’atelier, en prise sur ce qui surgit de ses sentiments, de ses émotions, des évocations imaginaires liées à son histoire propre, des résurgences mnésiques ; et sur ce qui émerge à partir des communications engagées avec les autres participants de l’atelier et avec l’animateur.

2°)  L’absence totale de direction de la production du sujet, et l’abstinence de toute intervention à visée d’enseignement technique, de toute suggestion thématique, de toute correction formelle, d’injonction émotionnelle, d’évaluation esthétique ou morale.
C’est dans l’affrontement direct, non médiat, de la matière que le sujet va se mesurer à ses lois intrinsèques, aux problèmes prétendus techniques surgissant de sa manipulation, et aux réticences à l’évocation de certaines formes particulièrement impliquantes pour lui. Lorsque j’interviens pour étayer le travail d’un participant, sous certaines conditions que j’évoque longuement dans mes récits, c’est toujours dans un processus de communication qui se joue à un autre plan que celui de l’aide technique, qui est celui de la relation intertransférentielle.


3°) L’abstinence d’interprétations des contenus latents des productions. Ce qui n’exclut pas de ma part certaines interventions verbales (parfois plastiques) apportées dans le cours du travail de création, lorsque, d’une façon ou d’une autre, sollicité par la personne, il m’arrive de faire description purement narrative d’éléments posturaux ou émotionnels évoqués dans/par l’objet, énonciations qui fonctionnent à la manière de la reformulation rogerienne, comme surlignage empathique… des sortes de ponctuations telles que : “Il semble qu’il est très en colère” à propos d’un petit personnage dont le visage est crispé, les poings serrés... ou bien, à propos d’un couple tendrement enlacé : “Il semble que ces deux-là s’aiment beaucoup”, interventions qui ouvrent la plupart du temps à un court dialogue autour de, ou en prise sur l’objet.

4°) La possible mise à disposition des personnes et du groupe, dans certaines situations intertransférentielles, de mon propre champ associatif traduit dans le langage de création qui est institué dans l’atelier. Le lecteur trouvera nombre d’illustrations de cette position dans  les aventures æsthétiques que je relate dans mon livre : "Argile vivante".
              
5°) L’ouverture, enfin, d’un espace analytique destiné à permettre aux participants d’explorer les incidences de l’expérience vécue de leur engagement dans le travail de création. Clarification des éprouvés actuels, des résonances émotionnelles, des retentissements psychiques...Il s’agit là d’une modalité d’analyse processuelle plutôt que de décryptage interprétatif des productions, sauf lorsque la personne s’engage spontanément elle-même dans cette aire d’exploration de son implication.
Par “analyse processuelle”, j’entends une certaine façon de nommer ce-qui-est-là, une façon de description littérale, dans le langage des zones érogènes du corps  (pour reprendre les termes de Françoise Dolto) tel qu’énoncé par le sujet ; de rendre compte de l’itinéraire
associatif formellement inscrit dans l’objet et des composants affectifs, émotionnels et psychiques lisibles “ à vue “, qui ont présidé (déterminé et accompagné) l’élaboration de l’œuvre.

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C’est la mise en synergie de ces cinq dispositions qui définit pour moi l’attribution d’une garantie minimale d’authenticité vis-à-vis du vocable expression utilisé dans ce mode d’expérience centré sur les médiations créatrices quelle qu’en soit la visée : éducative, artistique/culturelle, thérapeutique ou de formation professionnelle à la fonction d’animateur/analyste. De plus, l’utilisation du terme expression, dans tout autre orientation de l’action où l’animateur se pose, d’une façon ou d’une autre, en directeur de la formulation subjective doit être refusée sans ambiguïté.

L’application de ces dispositions qui requièrent une réelle ascèse de la part de l’animateur / analyste, engage très rapidement les participants dans un champ de projections trans-férentielles à de nombreux niveaux, dont les productions constituent les formulations et les traces.

 Ainsi se trouve résumée l'essentiel du cadre de mon expérience professionnelle de d’analyste (thérapeute ou formateur) et de l'élaboration théorique qui en soutient le développement. La conviction qui m'anime s'est formée au point de rencontre de mon métier d’analyste et de thérapeute, dans ma pratique quotidienne de la formation, dans celle du travail analytique individuel avec des personnes en grande souffrance affective que j'ai accompagnées, et de la rencontre intellectuelle de marqueurs idéographiques puissants que j’ai déjà cités : Carl ROGER'S et son passeur français Max PAGÈS, Arno STERN, WINNICOTT, Harold SEARLES, Mélanie KLEIN, Daniel STERN, l'Antipsychiatrie, l'Analyse Institutionnelle, le Théâtre du Corps et les recherches électro-acoustiques d'avant garde des années 70, le théâtre BUTO, l’ Expressionisme,  DUBUFFET et l’Art BRUT.
         
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Le lecteur comprendras ce que peut signifier ce niveau d’exigence dans le cadre de la formation de personnes qui recherchent une formation centrée sur l’expérience créatrice comme lieu de transformation dynamique de la personne. Et que tout ce qui ne se pose pas comme une solide formation à l’accompagnement émotionnel,  à l’écoute analytique active non-directive relève des thérapies comportementale inspirées du Dr PAVLOV.

Cette exigence basique porte essentiellement sur l’expérience créatrice comme Parole (non verbale). Sur la conduite non-directive d’un espace/temps régulier consacré à l’élaboration de l’expérience vécue dans un temps de parole (verbale). Sur l’accompagnement latéral des manifestations affectives et émotionnelles qui en sont le dividende.
Je voudrais dire pour terminer ma réflexion que l’expérience créatrice n’est pas une médiation  (médiation expressive, médiation créatrice etc…) mais le point focal du travail de transformation dynamique du sujet (ce que je nomme le travail métamorphique). Expérience créatrice et changement tonique sont un unique et même processus.

Ce qui est opérant, ce qui produit la transformation créatrice, c’est le processus de la Parole dans le jeu de la création. L’expérience créatrice est fondamentalement Parole.

C’est le processus de la création et le travail de la parole qui constituent le centre de l’expérience créatrice aussi bien que de l’expérience analytique. C’est très simple !

Il n’est pas concevable qu’un cadre institué comme thérapeutique ne soit pas constitué comme analytique, c’est à dire donnant lieu à un travail de co-élaboration entre le thérapeute/analyste et le sujet acteur de la Parole ? Tout ce qui se donne comme procédé créatif, toute manipulation de l’imaginaire par le biais de propositions mimétiques, (thèmes, procédés techniques, interventions correctives, suggestions) tout ce qui s’interpose à la spontanéité réelle de la personne, constitue une entrave ou une perversion de la pulsion métamorphique.
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Le lecteur pourra consulter la charte des Ateliers d’Art CRU sur Internet :
Charte Art Cru

Guy Lafargue
Octobre 2014
guy.lafargue@art-cru.com
art-cru.com

 Je remercie Guy Lafargue pour sa contribution à l'Association de Recherche en Art et Thérapie. 


[1] Cette partie de mon exposé est extraite du livre publié par le collège des psychologues cliniciens de l’Hôpital psychiatrique Charles Perrens de Bordeaux : “DU NOUVEAU DANS LA PSYCHO” : Édition Champ social,  article intitulé :
EXPÉRIENCE CRÉATRICE / RELATION ANALYTIQUE
EXPÉRIENCE ANALYTIQUE / RELATION CRÉATRICE
DANS L’INSTITUTION DE SOIN

dimanche 2 novembre 2014

LA PRATIQUE DE L’ART-THÉRAPIE EN TANT QUE SOIN PSYCHIQUE (2)

Béatrice Constantin-Mora, art-thérapeute analytique en Dordogne


L’acte, tout d’abord, de s’autoriser à penser une pensée qui n’aurait pas pu être supportable quelques temps auparavant et oser la prolonger dans un geste qui vient inscrire une trace dans la matière. Oser ce geste, c’est s’exposer au possible d’une trouvaille, à un non savoir immédiat. Je pense que l’acte soignant en art-thérapie se trouve beaucoup dans cet écart qu’il y a entre ce qu’un patient s’autorise à penser, à être et une mise en forme concrète avec la matière, en présence d’un autre, dans un cadre suffisamment défini pour qu’il soit fiable et digne de confiance. Pour l’essentiel, un  atelier, en tant que « lieu d’expérimentation[5] » qui tient lieu « d’éprouvette psychique ». 

En cela, pour respecter et garantir les productions inconscientes du sujet, je pense qu’il n’y a pas nécessité d’exposer  ces rebu(t)s, ces ratés du langage aux yeux d’un public. Le patient en atelier d’art-thérapie n’est pas un artiste, il s’essaye avant tout à devenir un sujet, à faire le tri dans le trop plein ou à recoller les morceaux d’un puzzle avec sa propre vérité, son propre style, à l’abri des normes esthétiques, normatives et autres critères de jugement. Ceci dit, ce jeu créatif avec la matière peut se prolonger comme je le constate chez certaines patientes, par la pratique d’une activité artistique seule ou en atelier. Et pourquoi pas en vue d’exposer.

La démarche est ici créative au sens winnicottien, et non artistique. Un artiste s’est suffisamment détaché de son œuvre pour pouvoir la soumettre au regard d’un public, et à son appréciation, en vue de la vendre. L’atelier d’art-thérapie est tout aussi indiqué pour un artiste en panne d’inspiration ou dans un passage compliqué de sa vie.

L’art-thérapeute se laisse travailler par la relation au patient lui-même et celle de ce dernier avec l’objet au cours du processus créatif, ici et maintenant. Pour reprendre Winnicott[6], il est lui aussi en situation de jeu[7],  il a l’expérience de cette situation de création à visée thérapeutique, et continue à mener une analyse de ses propres productions inconscientes, en vue d’éviter de se laisser embarquer du côté de la fascination que peut procurer l’objet, garder le cap de son propre désir et garantir ainsi celui du patient. D'où l’importance des temps de supervision.

Ce triptyque patient/thérapeute/matière ou objet a ceci de différent d’une thérapie purement verbale que le thérapeute n’est pas le seul destinataire du transfert, qu’un autre lieu peut en devenir  le dépositaire. Un peu comme une réactivation du stade du miroir, cet objet, de l’état transitionnel, se transforme en objet relationnel[8]. En présence de l’art-thérapeute,  ou en co-création, c’est bien Mme A. ou Mr R. qui est en train de mettre en acte, d’agir sur et avec sa propre matière inconsciente.

Le sens naît dans un second temps, à partir de ce que le patient a ressenti au cours du processus de création et des associations liées à l’expression symbolique de l’objet crée. L’art-thérapeute l’accompagne dans ces différents niveaux de symbolisation, qu’ils soient sensoriels, verbaux ou en résonance avec une image.

Quel que soit l’objet crée, il surgit d’un élan, d’une impulsion qui se fait nécessité. Il  ne peut que très difficilement être rationalisé. Et si analyse, il y a, elle ne peut pas se faire avant que le sujet n’ait réceptionné d’abord pour lui-même ce qu’il vient de produire. Suite à la réalisation de cet objet chargé d’émotion, un temps est nécessaire pour que le sujet réalise ce qu’il a fait et que c’est lui qui l’a fait.

En disant cela, je souhaite orienter mon propos vers un parti pris et un souhait, qui me semblent être un engagement envers les personnes qui s’adressent à nous dans notre société contemporaine, c’est que l’art-thérapie et les art-thérapies concordent vers une pratique de singularité, de re-subjectivation ayant en cela une fonction humanisante plutôt que normalisante.

Dans cette orientation, on peut faire des ponts, des passerelles, entre des pratiques diverses, mais qui tiennent pour essentiel le désir du patient et celui du thérapeute, comme intention de soin et de prendre soin.

Et pour terminer, je pense que les divergences théoriques, voire idéologiques ne sont pas un frein à la reconnaissance de cette profession, mais bien un terreau fertile car elles démontrent la vivacité, la dynamique dans ce domaine. Elles valent mieux, à mon avis, que l’uniformisation du savoir et des pratiques. On peine parfois à s’y retrouver, mais c’est vivant, incarné, créatif.

Cependant, ces discussions et ces débats restent peut être trop confidentiels et ne touchent qu’une infime portion de toutes les personnes susceptibles d’être concernées par l’art-thérapie, à commencer par les patients eux-mêmes ou des proches de personnes en difficulté.

Oui, un diplôme d’état permettrait une légitimité et une vraie reconnaissance auprès du public et des institutions. Attention toutefois que cela ne privilégie pas la forme sur le fond. On a vu à quoi l’évaluation des « bonnes » et des « mauvaises » pratiques a abouti, notamment dans le secteur social et médico-social.

De plus, les secteurs « psy » qui ont pignon sur rue sont-ils prêts à se laisser concurrencer par cette « petite » art-thérapie qui viendrait poser ses médiations dans leur pré carré ? Le passage, en ce qui me concerne, du salariat au libéral en tant qu’art-thérapeute analytique me permet de constater que les débats d’idées tournent court quand il s’agit de garder sa patientèle. Quelques psychologues et psychanalystes me démontrent heureusement le contraire, mais la tendance serait plutôt à la porte fermée et au chapelet d’ail.

J’arrive au terme de cet article et je vous remercie de m’avoir lu jusqu'au bout.

« Art-Thérapie », ce mot est certes peu facile à porter et à colporter, mais il ne doit pas être l’arbre qui cache la forêt des praticiens, des chercheurs, des auteurs qui, quel que soit leur orientation clinique, ouvrent une porte vers la créativité comme remède à la perte de liens dans notre société contemporaine.

Alors, c’est peut être une influence de la Dordogne, mais quand je vois ces traces humaines, animales ou végétales âgées de 40 000 ans, je me dis que l’art-thérapie a de beaux jours devant elle !





[5] Jean-Pierre Royol, « Quand l’inaccessible est toile », Edition Broché, 2008
[6] « Jeu et réalité », L’espace potentiel, Collection Connaissance de l’inconscient, Gallimard, 1971
[7] P 55, « Jeu et réalité »
[8]  P 81, Guy Gimenez, « Les objets de relations », « Les processus psychiques de la médiation », Dunod

Je remercie Béatrice Contantin-Mora pour son apport à l'Association de Recherche en Art et Thérapie.

samedi 1 novembre 2014

LA PRATIQUE DE L’ART-THÉRAPIE EN TANT QUE SOIN PSYCHIQUE (1)

Béatrice Constantin-Mora, art-thérapeute analytique en Dordogne


 Le texte qui va suivre ne prétend pas décliner une réponse théorique à la pratique de l’Art-thérapie, mais cherche à la situer dans une pratique de soin, la distinguant sans s’y opposer, des pratiques d’animation, d’éducation ou de la pédagogie. Il est librement inspiré de certaines expériences vécues, revisitées par le filtre de ma subjectivité pour tenter de trouver une cohérence entre ce que je fais, ma pratique, ma recherche professionnelle et les remous provoqués par ce mot quand je le prononce…
… « ART-THÉRAPIE »… N’avez-vous jamais ressenti comme ce mot laisse place à un lourd silence, comme retentissent les invectives assourdissantes de ses détracteurs, ou ce regard d’incompréhension gêné de ne pas savoir, qui, dans un souffle ose un … « Mais qu’est-ce que c’est ???... »

Encore une de ces pseudo-thérapie à la mode ! Comme me le laissait entendre Mme La Présidente d’une association pour les personnes handicapées : « Oh ! De nos jours, tout le monde est thérapeute !! Ce qui n’enlevait rien aux coordonnateurs de l’Education Nationale : « Non merci, on a déjà tout ce qu’il nous faut !! ». Bref, allez vendre votre camelote ailleurs, ici nous n’avons que des gens qualifiés pour faire la même chose que vous !!! Des gens sérieux qui ne prétendent pas soigner avec des pinceaux et de la peinture. Ça, c’est de l’animation, du loisir, un jeu d’enfant ! Et d’ailleurs, quel serait votre statut ?

Et moi de penser à cette phrase : « Entre l’enfant curieux, inventif, passionné et l’adulte gourmé, traditionnel, incapable de s’évader de son cadre de pensée, de ses préjugés et de ses interdits, il a dû se produire quelque chose de grave. »[1]

L’art-thérapie est aussi méconnue auprès du public. Au téléphone : « Je vous passe Madame Constantin-Mora, ergothérapeute ? » « ?...Euh…non madame…, art-thérapeute », « … ». Ou des réactions aux mots « art » et « thérapie » : de « jenesuispasfou » à « à l’écolejen’aijamaissudessiner ».

En résumé des réactions à la fois cocasses et irritantes auxquelles je me suis confrontée depuis que je suis lancée dans l’art-thérapie en profession libérale… et même avant, (du temps où j’étais éducatrice spécialisée…)

Alors… Est-ce que j’ai toujours LA réponse aux questions et un argumentaire en béton ? Non. Est-ce que je remise ces remarques sous le tapis et continue mon chemin comme si de rien n’était ? Non, plus. Parce que ces remarques ont malgré tout en commun d’être justes. On trouve de tout et son contraire sous le terme d’art-thérapie. Actuellement, c’est vendeur, mais...NON, elle n’est pas réductible à un livre de coloriage. Alors, j’ai commencé à aller à la rencontre « des gens » pour dire ce que je fais et comment je le fais, y compris en constatant le flou artistique dans lequel nous met le mot « Art-thérapie » et en informant aussi sur les principales écoles et universités qui dispensent des formations.

En effet, ce mot, quand il est prononcé, semble porteur d’un double procès : celui de l’Art et celui de la Thérapie. Mais c’est à mon avis, oublier ce petit signe, le tiret, qui ne s’entend pas à l’oral, mais qui pourtant tient bien une place de médiation entre les moyens issus du domaine artistique et l’intention assumée de leur usage thérapeutique. Il symbolise pour moi, ce qui unit et sépare l’Art et la Thérapie, renvoyant ce concept à la théorie de la transitionnalité, où cette pratique s’origine, s’originant elle-même dans la théorie psychanalytique.

Anne Brun[2] nous le rappelle, D.W. Winnicott, Marion Milner et Mélanie Klein en sont les précurseurs. «C’est le constat de l’impossibilité de travailler exclusivement à partir du registre verbal qui a motivé l’appel aux médiations artistiques au sein de la thérapie analytique des enfants et des psychotiques ».

Cette phrase ne me permet pas pour autant d’opposer une pratique non verbale que serait l’art-thérapie à celle fondée sur la parole que serait le modèle de la cure analytique. Corps et parole sont liés dans un même mouvement par le langage. Y compris dans la cure analytique, le corps est mis à contribution dans ses maux à travers la parole et l’impossible à dire, à penser, à ressentir... Mais ce que j’entrevois, ce sont des thérapeutes qui constatent leur non savoir y faire avec les symptômes des patients et qui inventent, créent un mode d’accès vers et à partir de ce qui fait la singularité de cet autre.

Ce sont bien les sujets en souffrance qui orientent les découvertes et recherches thérapeutiques et non l’inverse.  Et les symptômes changent à mesure que change la société.

"On n'a jamais rien fait grandir avec des principes. On ne fait pas pousser une fleur avec des idées sur la botanique mais avec de l'eau, de la lumière et de la patience, beaucoup de patience, au jour le jour. On transmet à un enfant ce qu'on est - jamais ce qu'on croit qu'il faut être.
On est élevé par des gens qui ont été enfants : c'est donc leur enfance à eux qui nous élève".[3]

Nous sommes dans une société qui se soucie beaucoup de l’enfant : petits caddies au supermarché, rythmes scolaires… Mais placez un adulte devant une feuille de papier et il ne sait plus... Enfin…ne sait pas. Il dit qu’il ne sait pas s’il ne sait plus ou ne sait pas, bref, il s’emberlificote les pinceaux dans cette trouille qui le lie au regard de l’autre. Pourtant, ne dit-on pas à un interlocuteur familier qui semble ne pas comprendre notre discours : « Tu veux que je te fasse un dessin ? » Chiche ! Un dessin comme langage, comme une passerelle possible entre l’autre et moi, en dehors du code de la langue.

Quand un enfant nous donne un dessin, n’est-ce pas l’acte de donner plutôt que le dessin lui-même qui nous donne ce sourire béat de gratitude. Cependant, quand nous portons notre regard vers le contenu du dessin lui-même, notre expression risque de se transformer car il fait apparaître l’intention de l’enfant qui nous est destinée à travers des symboles.

Et oui ! L’adulte peut parfois sourire jaune quand il se découvre lui ou une situation familiale sous les traits de son chérubin. Chérubin a souvent très bien pressenti ce qui se passe sans qu’aucune parole ne lui ait été dite. De là à ce qu’on lui oppose une fin de non-recevoir, il n’y a qu’un pas.

           Ce « non-recevoir », les patients qui viennent consulter en art-thérapie l’ont bien perçu et cette sensation, restée gravée en eux demeure en attente. En attente d’un autre qui les voit, les entende, les accueille de façon inconditionnelle, en recherche du grand amour, déçus par l’amour, souffrants au travail, en quête de reconnaissance... Ce malentendu, structurel du sujet qui parle, se transforme au fil des années, pour certaines personnes, en mal à dire. Un mal à dire intraduisible avec des mots car il a pris corps bien avant l’acquisition du langage.  «Le malentendu est déjà d’avant. Pour autant que dès avant ce beau legs, vous faites partie, ou plutôt vous faites part du bafouillage de vos ascendants.»[4]

Par l’entremise d’un jeu avec la matière, l’art-thérapie propose des moyens de formulation métaphorique et métonymique de ce que les mots ou la parole sont impuissants à traduire. Le premier usage de l’art en art-thérapie ne serait-il pas la poésie ? L’écoute poétique du patient. Se laisser imprégner de son style de dire, des images, des signifiants utilisés, juxtaposés ou dans les liens qui les unissent.  Et se laisser aussi imprégner de son geste et du processus créatif qui le transforment en acte.



[1] (Demory, 1984, p. 59), citation extraite du texte « L’Art-thérapie : un espace favorable à la résurgence du potentiel créateur. » René Bernèche Pierre Plante, paru dans la Revue québécoise de psychologie (2009)
[2] « Manuel des médiations thérapeutiques » Edition DUNOD 2013
[3] Christian Bobin, « La merveille et l’obscur » Édition Paroles d'Aube
[4] J. Lacan, Le malentendu, 10 juin 1980, in Ornicar n°23, cité dans un article du site paris-psychanalyste.fr